La dame d’argile, de Christiana Moreau

Un magnifique roman choral qui trace le portrait de quatre femmes, entre le Quattrocento et notre époque. Sabrina est restauratrice d’art à Bruxelles, sa grand-mère Angela vient de mourir et elle hérite d’une sculpture en terre cuite signée Costanza Marsiato et intitulée La Sans Pareille. L’oeuvre se transmet de mère en fille ainée depuis des siècles, Sabrina pressent sa valeur et se demande comment Angela issue d’une famille pauvre pouvait détenir un tel trésor. Elle sort d’une histoire compliquée avec son ancien professeur d’histoire de l’art et décide qu’un séjour à Florence pour retrouver ses racines et celles de la statue s’impose.

Tour à tour Sabrina, sa grand-mère Angela, Costanza l’artiste du XVème siècle et la belle Simonetta Vespucci prennent la parole et racontent leur histoire. Sabrina mène son enquête avec l’aide de Stefano, un expert florentin qui ne tarde pas à tomber amoureux d’elle.

L’Italie de 1945 est ravagée par la guerre et la crise économique, il n’y a pas de travail et la misère règne. Giuseppe n’a d’autre choix que de partir pour la Belgique où il deviendra mineur dans un charbonnage dans des conditions terribles, puis ouvrier dans la sidérurgie. Angela le rejoint et raconte la dure condition des émigrés italiens déracinés dont les enfants grandiront dans leur nouveau pays.

Costanza vit à la fin du XVème siècle, fille d’un artisan et très douée, elle désire devenir une artiste, une vraie créatrice, mais ce rêve est interdit aux femmes. Elle se travestira en hommes et risquera sa vie pour suivre son projet, mais déjà les Médici sont en déclin, puis Savonarole prend le pouvoir. Il n’y a plus de place pour les fêtes, l’art et la beauté à Florence, Costanza s’enfuira juste à temps.

Simonetta a régné sur la ville vingt avant Costanza. Tout Florence était amoureux d’elle, en particulier Giuliano, le frère de Lorenzo il Magnifico et Sandro Botticelli qui en a fait sa muse pour toujours. Elle a posé pour de nombreux peintres et illuminé Florence telle une météorite avant de mourir à vingt-trois, laissant ses admirateurs inconsolables.

Christiana Moreau brosse de remarquables portraits de femmes, très convaincants et bien écrits. Elle nous parle avec brio de la place et du rôle des femmes à ces différents moments. Costanza est en avance sur son temps et elle ne pourra être reconnue, en dehors de sa famille et de son maître. Simonetta est une femme objet, mais elle a été élevée pour cela et apprécie finalement son statut de reine de beauté, ainsi que la relation platonique qui la lie à ses amis. Elle mourra très jeune mais est immortalisée par ses nombreux portraits. L’auteure parle abondamment de la vie à Florence et de l’art du Quattrocento, de la peinture, de la sculpture et des artistes. Ces parties sont très documentées et vraiment passionnantes, on voit bien que le sujet est maitrisé.

Le style est varié et très agréable, il coule comme l’Arno . L’auteure nous propose aussi toute une réflexion très intéressante sur ce qu’est un artiste et ce qui le distingue de l’artisan et sur la création en général. Ce roman historique est un coup de coeur que je recommande chaleureusement.

Merci à Netgalley et aux Editions Préludes pour cette magnifique découverte.

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