J’ai découvert avec grand plaisir cette nouvelle série de mystery cosy qui m’a tout de suite fait pense aux enquêtes de Lady Rose (M.C Beaton). Le cadre est plus ancien d’environ un siècle puisque le roman se passe dans la deuxième décennie du dix-neuvième siècle. Il paraît que l’héroïne renvoie aux romans de Jane Austen, mais je n’en ai lu qu’un et ça ne m’a pas frappé.
Béatrice est orpheline et a été recueillie à l’age de cinq ans par son oncle et sa tante qui ne manquent pas de lui rappeler plusieurs fois par semaine leur très grande gentillesse. On lui répète sans cesse qu’elle est ordinaire, n’a pas de charme et surtout qu’elle est priée de rester à sa place de vieille fille de vingt six ans qui n’a pas réussi à trouver un mari. Son avenir est tout tracé, elle sera dame de compagnie de sa tante ou gouvernante des enfants de ses cousins quand ils en auront, mais en attendant, elle ne doit surtout pas faire de vague. La famille est invitée à une partie de campagne chez les Skeffington, une amie de pension de Tante Véra. Surtout le richissime duc de Kesgrave y est invité et ces dames aimeraient bien en faire leur gendre, Flora cousine de Béatrice peut-elle rivaliser avec Emily Otley, une Incomparable ? Le duc est pédant, méprisant pour les autres convives et notre héroïne ne rêve que de lui jeter son assiette au visage, au moins elle n’est plus sur le marché du mariage. A deux heures du matin, elle se rend à la bibliothèque pour trouver un livre plus intéressant que le roman qu’elle a emporté. Elle bute sur le corps de Monsieur Otley, le duc tient encore le chandelier à la main, il a bien des difficultés à persuader la jeune femme de son innocence. Finalement tous deux se mettent à enquêter sur le « suicide » qui ressemble furieusement à un meurtre. Les dialogues entre ces deux personnages aux antipodes de la hiérarchie nobiliaire sont plein d’ironie et d’humour. Béatrice se révèle bien loin de la vieille fille fade qu’on l’accuse d’être, ce dont elle ne doute pas un instant. Et le duc est bien plus humain, intelligent et sensible qu’il ne le paraît à première vue. On voit la romance poindre de loin et je suis impatiente de découvrir la suite de cette série dont deux épisodes sont traduits pour le moment.
C’est un huis clos dans un manoir anglais, on est dans une enquête de style Cluedo. Tout le monde pourrait avoir eu une raison d’agir ainsi car les secrets des uns et des autres remontent à la surface, et ce n’est vraiment pas glorieux. Les vieilles rancunes sont soigneusement cachées sous le vernis des mondanités, mais tout le monde sait que la vengeance est un plat qui se mange froid. Les deux personnages les plus intéressants sont bien sûr le duc et Béatrice. Ce roman n’a rien de révolutionnaire mais il a tous les ingrédients qui font le succès de ce genre : un cadre historique intéressant, un brin de romance, des personnages inattendus, des rebondissements, peu de violence et beaucoup de déduction, Béatrice étant une digne précurseure de Miss Marple.
La place dévolue aux femmes dans cette société n’est pas brillante, elles ont un rôle de potiche, mais Béatrice est instruite et futée sous son apparence de petite souris effacée comme il se doit pour une orpheline, le duc n’est visiblement pas insensible à son charme. Les relations sociales sont marquées par une grande hypocrisie qui annonce la société victorienne. Béa est l’opposé de la belle Emily qui a une approche totalement superficielle de la vie.
Le style est fluide, léger et plein d’humour. Il y a bien quelques longueurs au début, mais on plonge très vite au coeur du sujet pour ne plus le lâcher. Je suis impatiente de découvrir la suite de cette série que je recommande chaleureusement. Je remercie Netgalley et les Editions Les Escales pour cette belle lecture.
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